“le tout sécuritaire n’est pas réaliste et le tout humanitaire impossible. Le véritable problème, c’est de trouver du travail aux jeunes”
Amadou Toumani Touré, Président de la République du Mali, le 6 octobre 2008
L’association Graulhétoise “Kana Dougou To” installe un centre de formation professionnelle au Mali. Elle veut offrir aux jeunes maliens d’autres perspectives que le mirage de l’émigration.
DansTonTarn a rencontré ses fondateurs et sa présidente.
Kana Dougou To
L’association Kana Dougou To est née à l’initiative d’Yvonne et Jean-Claude Mauco, deux Vauréens retraités de l’éducation nationale
Après avoir travaillé plusieurs années au Mali, pour le Groupement des Retraités Éducateurs sans Frontières (GREF), et participé à la création de structures éducatives dédiées notamment aux jeunes adolescents exclus du système scolaire, ils ont constaté que le cursus de ces derniers était bien souvent interrompu au terme des apprentissages fondamentaux. Afin de “proposer une formation professionnelle sur place pour éviter aux jeunes de se perdre d’abord à Bamako, puis sur les routes du désert, sur l’océan … ”, ils ont projeté d’installer un centre de ressources et de formation professionnelle, dans un village Malien.
Ils ont choisi Siby, une commune en voie de développement située au sud est de Bamako.
L’association Kana Dougou To a été crée en France en 2008, comme une structure d’accompagnement leur permettant de soutenir cette action, et de partager leur engagement avec leurs proches. L’association s’est installée à Graulhet. Monique Fauré, amie du couple, a soutenu le projet dès son origine et pris les responsabilités de présidente de l’association : “des graines avaient été semées et il s’agissait de les arroser”.
“Kana Dougou To” est la traduction phonétique d’une expression signifiant “ne pas laisser le village” en bambara.
Le projet de centre de ressources et de formation
Le centre sera construit sur un terrain de 2 Ha, mis à disposition par le chef traditionnel du quartier de Dissoumana sous forme de concession et qui appartiendra à l’Assemblée Régionale.
Sa construction débutera par un premier bâtiment en 2011 et comprendra à terme deux salles de classes, un atelier de construction mécanique et d’outillage agricole, un bureau, un centre de documentation, un local informatique, une cantine, une zone agricole, des vergers, etc.
Le centre sera bâti en utilisant la technique de la brique en terre compressé. Il sera édifé par des artisans locaux, aidés de jeunes stagiaires qui compléteront ainsi leur apprentissage dans le cadre d’un “chantier école”.
Financement
La construction du centre sera principalement financée par des fonds obtenus auprès de la Coopération Espagnole à Bamako .
Une association basée au Mali et baptisée “Kana Dugu Bila” (“ne pas quitter le village”), s’est constituée afin de gérer ce financement et de s’assurer sur place du bon déroulement des travaux. Elle regroupe divers acteurs de la vie associative locale (association des jeunes, association des artisans, chambre d’agriculture, association des femmes maraîchères …) impliqués dans la vie de Siby et au coeur du développement du village.
Les formations seront principalement axées sur le maraîchage et l’agriculture qui sont les deux piliers de l’économie locale : techniques économes en eau, fabrication du compost, découverte de semences et plantes mieux adaptées au climat et au terrain …
Elles seront assurées par un organisme Malien : le FAFPA (Fonds d’Appui à la Formation Professionnelle et à l’Apprentissage).
Le centre produira également des biens qu’il commercialisera et qui participeront à son financement.
Une approche éthique
Les responsables de Kana Dougou To construisent un projet d’échange. Ils considèrent que la compétence qu’ils apportent est complémentaire aux compétences locales, auxquelles ils ne doivent jamais se substituer : “les techniques sont traditionnelles, on y apporte des éléments qui les rendent plus performantes”
L’association exploite sa capacité à frapper aux portes, à monter des projets, à exploiter ses réseaux … Pour Yvonne Mauco, “tous les ingrédients nécessaires sont là, au Mali, pour que ce réalise ce genre de choses. Ce qui manque c’est la capacité de mettre en réseau et d’engager des synergies – On a mis en relation des choses qui existaient mais qui étaient dissociées“.
Concernant le maraichage bio, par exemple, ils précisent : “on a trouvé des tas de compétences hors de Siby – insecticides bio, par exemple, et on va [faire en sorte] que cette compétente aille jusqu’à Siby”.
Le projet de Kana Dougou To a un but précis et une durée déterminée. Dans 2 ou 3 ans le relais sera complètement pris sur place.
Monique Fauré : ” je trouve ça juste, je me méfie du néocolonialisme qu’il y a dans beaucoup de projets liés à l’Afrique. On n’est pas là pour entretenir sur la durée, mais pour accompagner un projet qui doit pouvoir fonctionner sans nous”
Dans ton Tarn
L’association participe à différentes animations dans le Tarn pour faire connaitre son action et partager son expérience :
- Graulhet en juillet 2009 : “Ciné de le pré” (repas, film et spectacle de danse avec SODIA)
- Lavaur en novmbre 2009 : présentation de l’association et lecture avec Eléonore Lou-Sih
- Graulhet en septembre 2010 : forum des associations
- Lavaur, fin 2010 : participation à deux soirées de danse, dans le cadre du festival Traversées Africaines, en partenariat avec l’association Ebenbao.
Kana Dougou To a par ailleurs la volonté d’intervenir dans des établissements scolaires. Un projet de “malle pédagogique” sera mis en place à moyen terme.
L’association, enfin, regrette de ne pas avoir de site internet, par manque de compétence … et de temps
Les premières actions concrètes
En attendant que le centre soit construit, l’association a d’ores et déjà organisé des formations au techniques du maraichages, destinées à des femmes et à de jeunes adultes.
Deux groupes de 20 personnes ont suivi ces stages en février et novembre 2010, dispensées par des formateurs maliens de l’association 3AG.
Une forme de parrainage permettant d’associer les adhérents et sympathisants est mise en place. A l’issue des formations, chaque stagiaire est doté d’un pécule lui permettant de s’équiper avec le matériel qu’il jugera utile pour exercer son activité.
Conclusion
“En 2003 beaucoup de jeunes voulaient tenter l’aventure [de l’émigration]. Pour la famille c’était une chance – on aidait ce jeune. Mais les choses se sont sues: en 2004, 24 jeunes de la région de Sibi sont morts en mer.
Une réflexion se met en place – les gens se rendent compte que c’est un leurre et les mentalités évoluent. (…) [ils pensent que] ce n’est pas en partant qu’on va s’en sortir … ”
Yvonne Mauco
Pour aller plus loin …
- Vous pouvez contacter l’association Kana Dougou To au 05 63 41 43 65
- La citation d’Amadou Toumani Touré est extraite d’un discours prononcé en 2008 à l’occasion de l’inauguration du “centre d’information et de gestion des migrations”
lire l’article sur le site du minstère Malien de l’extériur et de l’intégration Africaine - Le GREF (Groupement des Retraités Educateurs sans Frontières) est une ONG d’environ 500 adhérents, à grande majorité retraités de l’enseignement. Elle existe depuis les années 80 et intervient dans plusieurs pays (Afrique, Amérique Latine, Haiti, Pays de l’est, etc) sur des projets qui ont une certaine durée de vie.
plus d’informations sur le site internet du GREF - Le Bambara est la plus pratiquée des langues nationales du Mali.
plus d’informations - Le Festival “Traversées Africaines” a lieu tous les ans, en fin d’année, dans ton Tarn. Il fêtera ses 10 ans en 2011.
le site du festival - L’association Ebenbao organise des stages et des spectacle de danse africaine dans la région de Lavaur
le site de l’association Ebenbao
Gallerie photos
les images contenues dans cet articles sont soumises à copyright, et non libres de droit
merci à Véronique C. pour sa relecture et ses conseils
L’association “Kana Dougou To” a changé de nom, pour se baptiser “Kana Dougou Bla”